Valeur liquidative
Durant plus de cinq années (de 2015 à 2020), les fonds d’investissement H2O (OPCVM) ont acquis environ 2,34 milliards d’euros de titres de dette privée, illiquides du groupe Tennor, holding d’investissement du financier allemand Lars Windhorst déjà connu à l’époque pour ses transactions controversées et ses problèmes juridiques1. Le Groupe a par la suite été jugé insolvable en 2021 par un tribunal néerlandais2.
H2O AM Europe SAS a ainsi fait l’acquisition des titres d’un seul Groupe et de ses filiales, ce qui l’a conduit à détenir plus de 70% de ses émissions. Une stratégie d’investissement qui violait clairement et délibéremment la règle du ratio d’emprise3. Le gestionnaire d’actifs H2O AM Europe SAS se retrouvait de ce fait particulièrement exposé.
En 2020, ces positions ont engendré de lourdes pertes des valeurs liquidatives. Les conditions du marché ne permettaient plus de vendre les actifs du groupe Tennor.
Par conséquent en octobre 2020, H2O AM Europe SAS a décidé de procéder à une gestion extinctive en scindant ses OPCVM H2O en deux :
- Un OPCVM-miroir (fonds-miroir) recevant les actifs liquides, à savoir ceux répondant à l’objectif de gestion des fonds et représentatifs des stratégies « Global Macro » pour laquelle les investisseurs avaient fait confiance à H2O AM, et qui permet aux gestionnaires de continuer à le gérer normalement ;
- Un OPCVM de cantonnement (« side-pocket »), dépositaire de l’ensemble des actifs non liquides de l’OPCVM H2O, destinés à être vendus ultérieurement aux meilleures conditions de marché ;
H2O AM Europe SAS, une gestion opaque
Dès la création des side- pockets, H2O AM Europe SAS a discrétionnairement et sans être contredite, ni par les tiers de confiance en charge de la valorisation des titres (CACEIS et KPMG), ni par l’AMF, revu à la baisse la valorisation d’une partie des actifs Tennor détenus, portant la valeur des actifs cantonnés à 1,6 milliard d’euros. H2O AM Europe SAS n’a jamais apporté la moindre explication quant à cette dépréciation et niait, à l’époque, l’illiquidité des titres Tennor.
Une dépréciation de plus de 700 millions d’euros a donc été passée de manière discrète avant la constitution des side pockets. Celle-ci représente, de fait, un abandon de créance considérable au profit de Lars Windhorst, sans contrepartie, et au détriment de l’intérêt des porteurs.
Il est à noter que de nombreuses communications publiques de H2O, relayées par certains médias, laissent entendre que l’AMF aurait approuvé les valeurs liquidatives retenues à la création des side pockets et préjudiciables pour les épargnants. Or la réalité est que le régulateur n’a pris aucune position sur le sujet à ce jour.
Dès le 25 mai 2021, la restructuration des fonds cantonnés par H2O AM – pilotée par le Groupe Natixis qui en détenait le contrôle – a entrainé une nouvelle baisse inexpliquée des encours à 1,45 milliard d’euros. Par cette nouvelle dépréciation, H2O AM accorde à nouveau un « abandon de créance » au profit de Lars Windhorst, propriétaire du holding Tennor, et au détriment de ses propres clients.
Où en est le dossier aujourd’hui ?
Quatre années se sont désormais écoulées durant lesquelles H2O AM Europe SAS a entretenu, et continue d’entretenir, l’opacité sur la situation financière des side-pockets en maintenant une valorisation artificielle et erronée de ces derniers, tout en communicant de façon mensongère sur des « remboursements » qui n’en sont pas. En effet les quelques 229 millions remboursés aux porteurs lésés à ce jour ne proviennent à priori pas de Tennor, mais de liquidités détenues dès le début par H2O et les fonds..